«Cupidon, Propriétaire de l'Immeuble situé sur l'Enfer et le Paradis», le spectacle que signale votre première présentation au Portugal comme artiste avec votre compagnie «Cie P.P. Dream & Gilbert Peyre» et qui est le spectacle d’ouverture du festival FIMFA. Que peut-on attendre de ce spectacle ?
«Cupidon» bouscule les règles, fait découvrir un monde étrange, inhabituel, déconcertant où la technologie a sa part de rêve. On ouvre une boîte et cela nous parle de la vie, du sexe, de l’amour, de la folie mais tout n’y est pas aussi joli que les belles images nous le laissaient croire...
C’est une œuvre d’art mise en scène, les sculptures animées sont aussi des comédiens ; c’est comme une exposition transposée sur une scène de théâtre, avec les codes du spectacle vivant et de l’opéra. Plusieurs tableaux défilent, sonores aussi, avec la musique de Gérard Pesson intégrée aux bruits des machines tout au long du spectacle et celle de Raphaël Beau accolée à la chanson de Caruso, au moment où évoluent La Jupe et le Pantalon.
Comment pouvez-vous décrire votre relation avec les marionnettes, vous la voyez comme une bonne représentation de la nature humaine et de ses relations? Certainement avec beaucoup d’humour, j’imagine que vous vous amusez pendant que vous écrivez les spectacles et vous matérialisez les personnages. Comment pouvez-vous décrire votre processus de création? Est-ce possible pendant les présentations d’y avoir de l’improvisation et du «acting»?
Depuis mon enfance, je mets en mouvement tout ce que je trouve; ma façon de créer est ainsi, je visualise l’objet avec le mouvement. Je projette des images, je suis un Plasticien et j’ai des visions comme un peintre, un sculpteur. Je réutilise les objets, les images qui m’ont plu et je recrée un puzzle avec mes sculptures, je réinvente une histoire, au fil du temps, de mon inspiration. J’avais déjà créé des saynètes en 1998 avec Achille Orsoni et la robe aux ampoules tournoyantes; il chantait en play back ce texte d’Yves Garnier avec la soprano Lydie Morales et avançait déjà sur un petit charriot.
Puis, «Cupidon» a démarré en 2007 avec Achille Orsoni/Cupidon, ce texte chanté/enregistré par la soprano et juste l’armoire, symbole de la religion et cela durait 15 minutes. Pour sa création à la BIAM en 2009 à Pantin, la durée est passée à 1h, j’étais alors entouré d’une équipe technique et artistique. Les premiers acteurs à avoir créé le rôle avec moi, Corinne Martin et Achille Orsoni, ont enregistré les voix sans que je leur explique ce que je voulais exprimer. Flore Marvaud pour créer la lumière, s’est inventé son histoire personnelle ; Fabien Caron pour le son a été en totale osmose avec moi ; pour la création des costumes, nous avons beaucoup parlé avec Morgane Olivier, afin de ne pas refaire «Alice au Pays des merveilles». L’improvisation n’existe pas ici; tout est enregistré, millimétré; les comédiens ont des oreillettes et obéissent aux ordres donnés ; le texte est toujours chanté en play back. Mais la technologie s’est améliorée.
Les 2 manipulateurs (Juliette Zanon et Bachir Sam) qui télécommandent les objets, le siège de la Fiancée et de Cupidon, s’amusent parfois à aller plus loin dans les actions, mais leur liberté est restreinte par la technologie. Ils font corps avec les comédiens Cupidon (Jean-Yves Tual) et la Fiancée (Marie De Oliveira), qui amènent leurs propres émotions, se lâchent, jouent avec le regard, le visage, les bras. Mais le bas de leur corps reste figé, ils sont assis à genoux, dans une position qu’on a essayé de rendre la plus confortable possible ! Dans le dernier Festival Materia Prima à Cracovie, leur jeu était magnifique, il y avait de l’amour, qui a emporté tout le public, debout à applaudir.
Seule la Gouvernante (Gaëlle Fiaschi) marche normalement, mais contrainte dans une jupe étroite qui la force à faire de petits pas. Si je dirige mes comédiens comme des marionnettes, j’espère ne pas être un manipulateur pour autant !
Je ne suis pas quelqu’un qui sait communiquer, se livrer, parler de son art; donc, mes œuvres parlent pour moi et l’humour y transparaît toujours, car la vie sans humour est impossible. Sans amour non plus, d’ailleurs.
Votre travail a été décrit comme comédie mécanique (à peu près comme «Cirque Calder»), un cirque, un défilé, une liturgie. Et vous-même comme un génie, un inventeur, un maître du do-it-yourself. Le do-it-yourself a un rôle majeur dans le développement de vos spectacles et l'épithète de génialité n'est pas attribué sans raison. Comment le do-it-yourself est-il né et que cherchez vous a travers cette méthode?
Je suis issu d’une famille nombreuse, je n’ai pas fait d’études et je suis parti à 14 ans de chez moi en apprentissage. J’ai fait plusieurs métiers, mais, j’avais en moi un mal de vivre, que seul l’art a réussi à apaiser. Ma rencontre avec ma femme Laurence en 1984 m’a aidé à être plus ouvert aux autres aussi.
Et moi qui travaillais en solitaire dans mon atelier, j’en viens désormais à m’entourer de techniciens, de comédiens. En 1996, j’ai créé ma Compagnie P.P.Dream avec ma femme et j’ai monté «Ce soir on tue le Cochon» tout seul ; pour Cupidon en 2009, le Vikonte de Bartholin m’a soutenu et a amené une partie de l’équipe technique. Aujourd’hui, Loïc Guyon, le régisseur général, apporte une professionnalité à toute l’organisation.
Le mot génie, ce sont les autres qui le prononcent, moi, je travaille, j’avance, avec difficultés, car pour montrer Cupidon notamment, il en faut des énergies; l’équipe accepte nos conditions, nous ne sommes pas subventionnés; je monte un projet de spectacle comme je réalise une sculpture animée ! Je ne cherche pas d’argent avant. Avec Laurence, on fait tout dans notre compagnie, mais on y arrive !
Je ne prêche pas le do-it-yourself, mais si on a quelque chose à dire, à sortir, il faut y aller à fond. Ne pas chercher à utiliser des moyens trop onéreux au départ. Maintenant, la moindre des choses que je fabrique entraîne des dépenses, pour la pneumatique par exemple, car rien n’est récupéré. Mais, je suis entouré de gens généreux, comme Fabien Poutignat (Loupi Electronique) et l’ingénieur électronicien Robert Breton.
Dans mon travail d’artiste, j’ai toujours eu des montagnes à soulever, tout se fait toujours à la force du poignet, j’aimerais bien être plus soutenu financièrement ; heureusement, quelques organismes culturels ont montré Cupidon à Paris en 2009-2010 et depuis, chaque année, un festival étranger se bat pour le présenter. Il est dit que créer dans la douleur est plus bénéfique...mais, il y a 9 personnes dans l’équipe Cupidon, je ne suis plus seul ; nous allons montrer Cupidon à Paris, sous le chapiteau du Cirque Electrique du 11 au 22 septembre, ce sera une nouvelle aventure...
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Photos par Krzysztof Wojcik
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Photos par Krzysztof Wojcik
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